Auteur Sujet: Note de lecture provisoire : Hurni et Stoll  (Lu 5783 fois)

Jacques

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Note de lecture provisoire : Hurni et Stoll
« le: avril 24, 2006, 01:26:47 pm »
En janvier j'aurais dû rédiger la note de lecture suivante (Il y en a des choses que je devrais faire avant-hier !) :
Maurice Hurni et Giovanna Stoll. Saccages psychiques au quotidien ; Perversion narcissique dans les familles. 2002, L'Harmattan, Paris.
Pages 207 à 261, ils revisitent le cas Dora, relaté par Sigmund Freud dans Cinq psychanalyses. Ils le revisitent avec leur expérience de patients pervers, sous l'éclairage des concepts créés par Paul Racamier, notamment celui d'incestualité.
Freud fut là entièrement manipulé et mystifié par le père Bauer, qui l'utilisait pour que Dora ne fisse plus d'obstacles à ses jeux incestueux et adultérins. Le marché réel que le père Bauer voulait faire tenir par sa fille était "Cède aux avances de Monsieur K. qui en échange me laisse coucher avec sa femme !".

Sur SOS Papa, au premier semestre 2005, on avait vu de même le cas de "Que Faire", ex-"Inmaculada", qui voyait sa mère faire alliance avec l'ex-mari de "Que Faire", pour la priver de son enfant.
C'est quoi, des parents comme cela ?

Hurni et Stoll développent la description du vide intérieur du pervers, qui se vide de tout affect, par sa virtuosité à exporter l'enfer, à manipuler les autres pour les engeigner. Un chapitre est consacré au problème médical de la vulnérabilité du médecin devant des patients pervers.
Hurni et Stoll ébauchent le lien de la pathologie individuelle avec la culture, avec les porteurs sociaux de la culture de la perversité. Il reste amplement à faire dans ce domaine. Le principal de mes derniers essais à ce sujet, reste à http://jacques.lavau.perso.sfr.fr/Joie_de_nuire.htm.

Une piste à explorer, serait de distinguer entre la structure perverse individuelle, et les emprunts de routines et de conduites de perversité. Autrement dit, il nous faut emprunter aux méthodes de l'ethnopsychiatrie. Cela ne nous simplifie pas la tâche, mais c'est indispensable pour dépasser les banalités inefficaces.

Prenons l'exemple de l'avarice. L'Avare de Molière a été précédé par celui (Aulularia) de Plautus, dramaturge romain qui vivait sous la république, de 254 à 184 AC. Trente-quatre ans de mariage m'ont appris que contrairement à ce que les dramaturges avaient brocardé, l'avaricieux n'est pas quelqu'un qui aime (trop) l'argent (ce qui ferait de l'avarice une pathologie strictement individuelle), mais un pervers qui a trouvé une façon socialement sans danger pour lui, socialement bien acceptée, pour agir sa haine de son prochain, et faire souffrir au maximum ses proches et tous ceux qui sont dans son rayon d'action. Or justement, l'avarice romaine se dissimulait aisément sous l'âpreté au gain et la rudesse au travail, vertus aux origines même de l'agriculture dans le Latium, et à la fondation de la bourgade de Rome.
Reformulons-le en termes plus généraux, réemployables : l'avaricieux romain, ou du 17e siècle, empruntait aux conduites répandues en son temps, ayant une connotation favorable de saine économie, afin de nuire et d'exporter la souffrance. En bon pervers, l'avaricieux ne souffre pas : il fait souffrir.


C'est pareil avec ces virtuoses de l'exclusion parentale : ils/elles ont trouvé autour d'eux/elles des astuces pour manipuler aisément les juges ou les experts, voire ont trouvé aisément des complices en perversité. Ici et maintenant, c'est massivement l'idéologie féministe qui sert de pavillon de complaisance :
"Nous sommes toutes des victimes ; nous devons toutes nous venger de l'oppression et de la domination, sur chaque mâle qui est sous la main, et facile à faire souffrir..."

Possibilités d'action : sur l'idéologie perverse, lui faire perdre son hégémonie culturelle.
Sur la pathologie individuelle ? J'avoue ma totale perplexité. Si j'avais des solutions pour reprendre ces cas graves de perversité paranoïaque, je serais preneur. D'une manière générale, on manque cruellement de "success stories", de récits de succès, dans le traitement des paranoïas de la maturité. La pharmacopée des antipsychotiques (efficaces sur les délires des schizophrènes) est sans effet, sauf tout au plus sur les crises délirantes aiguës.

En fait, il faut accepter le fait, inconfortable, qu'il faut agir sur l'environnement social du paranoïaque, récompenser ses actes authentiques, bloquer ses actes nuisibles, retirer un à un ses pouvoirs de nuire, mais lui donner des réassurances de sécurité individuelle. Voir par exemple la façon dont Henri Ford II a repris en main la compagnie fondée puis ruinée par son grand-père devenu paranoïaque : Ne t'inquiète plus, grand-père, je suis là, et je gère bien l'héritage !
Autrement dit, agir en fonction de critères éthiques, indiscutablement éthiques.

Et l'éthique n'est pas dans l'air du temps, qui est plutôt cynique et anti-pensée. Il suffit d'écouter les publicitaires pour en avoir trente preuves par heure.
Le militantisme victimaire rend-il davantage fou, qu'il n'attire les déséquilibrés ? Ceux qui veulent devenir bourreaux ou bourrelles à leur tour ?
Je m'inquiète des antidotes...